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Pourquoi mettre à jour les statuts de société en présence d’un démembrement ?

Publié le 12 novembre 2023, par chloe

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Plusieurs arrêts récents nous donnent à repenser la rédaction des statuts de sociétés en présence d’un démembrement de propriété sur des droits sociaux ou pour anticiper une telle situation.  

1° La qualité d’associé, un attribut exclusif du nu-propriétaire 

Tout d’abord, la Cour de Cassation a mis fin à un débat de longue date en affirmant dans un avis de 2021( 1), que l’usufruitier n’a pas la qualité d’associé. Quel impact vous concernant particulièrement ?  

Et bien, certaines actions et certains droits ne sont ouverts qu’aux associés, dont l’usufruitier ne fait pas partie, nous en sommes désormais certains.  

La Cour de Cassation ne ferme toutefois pas la porte totalement et admet que dans certaines situations, lorsque la question « aura une incidence directe sur son droit de jouissance », l’usufruitier puisse disposer des prérogatives de l’associé.  

Il est peut être temps pour vous de consulter votre notaire pour vérifier si les statuts sont toujours en accord avec le droit actuel. 

2° L’aléa sur les distributions de dividendes tirés des réserves ou des résultats exceptionnels en présence d’un démembrement de propriété

L’autre sujet, et pas des moindres, concerne la question de la distribution des dividendes, suivant leur origine, entre l’usufruitier et le nu-propriétaire.  

Il est avéré que les dividendes tirés du résultat courant de la société reviennent à l’usufruitier, s’agissant de fruits.  

En ce qui concerne les dividendes distribués prélevés sur les réserves, la question de la nature de ces dividendes a été tranchée récemment ( 2). Il s’agit de produits.

Cela étant, les trois arrêts, ayant suscité l’émoi, ne s’accordent pas en ce qui concerne le sort de la répartition des dividendes, en l’absence de clause en aménageant la distribution. En effet, pour les chambres commerciales de la Cour de Cassation, il s’agit de produits qui sont, en l’absence de convention contraire, distribués en totalité à l’usufruitier, étant tenu à une créance de restitution à l’égard du nu-propriétaire. Pour la chambre civile, de tels dividendes doivent être distribués au nu-propriétaire directement, s’agissant d’un accroissement de l’actif social. Les juges restent silencieux sur la possibilité de mettre en œuvre une clause contraire. 

Ce que l’on peut tirer de ces arrêts pour notre pratique actuelle est qu’il subsiste toujours une incertitude quant au sort de ces dividendes lorsqu’ils sont distribués : reviennent ils au nu-propriétaire en pleine propriété ou à l’usufruitier sous forme de quasi usufruit sous réserve de la créance de restitution? 

En ce qui concerne les dividendes issus d’un résultat exceptionnel, à ce jour, la jurisprudence est silencieuse tant sur leur nature, que sur leur sort. L’analyse pourrait cependant être identique à celle concernant les dividendes prélevés sur les réserves. 

En conséquence, il est plus que nécessaire de définir en amont le sort de ces distributions dans les statuts, et de procéder à des conventions de quasi usufruit par acte notarié pour sauvegarder la créance de restitution, et sa possibilité de déduction fiscale au moment du décès de l’usufruitier. 

En tout état de cause, devant un tel aléa, pour ne pas laisser l’interprétation libre, n’hésitez pas à consulter votre notaire pour procéder aux aménagements statutaires et sécuriser de telles distributions !   

 

Références :
(1) Cass. Com., avis du 1er décembre 2021, n°20-15.164, FS-D et arrêt de Cass. Civ. 3ème, 16 février 2022, n°20-15.164.

(2) Cass. Com., 27 mai 2015, n°14-16.246, publié au bulletin ; Cass. Com., 24 mai 2016, n°15-17.788 publié au bulletin ; Cass. Civ. 1ère, 22 juin 2016, nos 15-19.741 et 15-19.516 publié au bulletin.